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Une mosquée dans l’Histoire de France

La Grande Mosquée de Paris fête son centenaire

La Grande mosquée de Paris célèbre depuis le mois de septembre dernier la fête de sa fondation. Construite dans le style hispano-mauresque, son minaret se style hispano-mauresque s’élance dans le ciel de Paris avec une hauteur de 33 mètres. La taille des minarets doit en tout cas se conformer au plan local d’urbanisme. La mosquée se situe dans le Quartier latin, et plus précisément dans le quartier de la rue Mouffetard, non loin du Jardin des Plantes. On compte aujourd’hui en France environ 2 000 mosquées.

C’est en 1922 que la première pierre est posée. Le 15 juillet 1926, elle est inaugurée, devenant ainsi la plus ancienne des mosquées en France métropolitaine, et le lieu par excellence de tous les musulmans qui se trouvent sur le territoire national. La Grande Mosquée de Paris est construite en hommage aux combattants maghrébins de la Première Guerre mondiale. La mémoire collective a retenu le nom des «tirailleurs sénégalais» et des «spahis» maghrébins. Le contingent colonial le plus important était celui composé par les 250.000 Maghrébins (Algériens, Marocains et Tunisiens). L’histoire a aussi retenu le nom des « zouaves » (nom d’une tribu berbère en Algérie).

Un peu d’histoire…

La France étend sa domination coloniale au Nord de l’Afrique ; au Maghreb. Au cours du 19ème siècle et au tout début du 20ème siècle elle contrôle politiquement et économiquement l’Algérie, la Tunisie et le Maroc. Une politique juridique et politique est pratiquée en faveur des Français Les premiers mouvements nationalistes récusent et rejettent la présence coloniale française au Maghreb.

La prise d’Alger en juillet 1830 marque l’imaginaire. La France s’installe sur les côtes algériennes. De 1840 à 1857 l’armée française défait l’Armée des Maghrébins dirigée par l’émir Abd el Kader (1847). A partir de 1840, les premiers colons arrivent en Algérie. Le Maroc et la Tunisie célèbrent leur indépendance en 1956. Il faudra attendre pour qu’après une longue et meurtrière guerre, l’Algérie trouve elle-aussi le chemin de son indépendance 1962.

En 1922, est décidé de faire un geste en direction de la communauté musulmane et maghrébine engagée dans le premier conflit mondial.

Plus de 600 000 soldats coloniaux sont mobilisés. La moitié d’entre eux étaient originaires du Maghreb. La conscription des « indigènes » est mise en place en Algérie, à la suite d’une Loi de 1911. Ce recrutement ne fait pas l’unanimité auprès des Européens dans les trois pays du Maghreb ; et principalement en Algérie.

Les « indigènes » feront montre d’héroïsme, et seront reconnus par les autorités militaires de haut rang pour leurs faits d’armes. Ces troupes figurent parmi les plus décorées. Les tirailleurs algériens reçoivent plus de 20 % des plus hautes distinctions décernées. Les deux régiments de tirailleurs marocains ayant combattu reçoivent sept citations à l’Ordre de l’Armée. Loin du front, la France envoie 180 000 travailleurs en Métropole pour renforcer l’activité économique et industrielle. Après le conflit, beaucoup d’entre eux resteront en France. Les premiers quartiers historiques maghrébins de France font leur apparition: la Goutte-d’Or et Beaugrenelle (Paris) ou Vénissieux (Lyon).

Au Maghreb, d’importants changements ont lieu, et les esprits prennent conscience politiquement de ce qu’ils sont véritablement. L’esprit de l’émir Abd el Kader est toujours présent… Les « indigènes » ont le sentiment d’avoir versé leur sang pour une cause qui n’était pas la leur. Un mouvement de réclamation de leurs droits en vue de des compensations voit le jour. Quand ils sont retournés chez eux, ils ont voulu être traité comme des Français à part entière, mais sans doute avait-on oublié leur héroïsme et leur farouche ardeur au combat. Le Deuxième conflit mondial réactivera ce même sentiment (cf. le film « indigènes » de Rachid Bouchareb – 2006).

C’est dans ce contexte que naît l’idée de cette construction.

Entre 1842 et 1846 plusieurs projets voient le jour tant à Paris qu’à Marseille mosquées, cimetière musulman ou collège). On échafaude l’idée d’une possible construction dans le Quartier Beaujon (Paris). Des raisons politiques s’invitent dans le débat. Certains souhaitent célébrer par un geste magnanime de la France en élevant un monument soulignant la Conquête et la pacification de l’Algérie. Dans la France de l’époque, l’antisémitisme larvée ou déchaînée comme au moment de l’Affaire Dreyfus  est à l’œuvre. Dans les hautes sphères de l’Etat, on estime que des raisons religieuses s’imposeraient pour minorer l’emprise judaïque. On estime que les musulmans sont plus proches du Christianisme que ne le sont les juifs. Le projet sera définitivement écarté.

Un Arrêté préfectoral, le 29 novembre 1856, concède un lieu réservé aux inhumations pour les musulmans au cimetière du Père-Lachaise. En 1914, les musulmans, dont les Ottomans, souhaitent voir le carré qui leur est attribué agrandit et marqué par une symbolique islamique plus expressive. La guerre ne permet pas que le projet aboutisse. En 1895, un projet de mosquée est présenté par le « Comité de l’Afrique française »; dont les Princes Bonaparte et d’Arenberg sont membres. Initialement c’est au Quai d’Orsay que la construction aurait dû voir le jour avec le soutien financier du Sultan ottoman, du vice-roi d’Egypte et du Sultan du Maroc.  En 1916, une mosquée est inaugurée dans le Bois de Vincennes permettant l’inhumation des Maghrébins mort sur le Champ d’honneur durant la Première Guerre mondiale.

Le projet se concrétise enfin le 16 juillet 1926.

La France laïque… L’Article 1er de la Loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Eglises et de l’Etat : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.» Pourtant la République financera à travers la Loi du 19 août 1920. Elle accorde au Président d’alors, Edouard Herriot, une subvention de 500 000 Francs pour construire la mosquée ; et plus exactement un Institut musulman (Al-Ghazali) qui comprendrait une mosquée, une bibliothèque et une salle d’étude/conférences. C’est encore le cas aujourd’hui…

C’est grâce à une Société – fondée en 1917 – ayant son siège en Algérie que la loi a pu être contournée. Il s’agit de la Société des Habous des Lieux Saints de l’islam. Elle avait été créée pour faciliter l’organisation du Pèlerinage à La Mecque. C’est à cette société qu’est confiée le dossier de construction de ce lieu « d’intérêt public et national », et son suivi. Depuis lors, c’est cette association de type 1901, qui en est le propriétaire suite d’une donation de la Ville de Paris. En 1980, le ministre de l’Intérieur et des Cultes, Gaston Deferre, retire la tutelle de la mosquée du ministère et de la Ville de Paris. L’Algérie peut désormais financer un tiers du budget de la mosquée. Bien qu’indépendante, elle demeure religieusement et culturellement liée à l’Algérie. C’est elle, par exemple, qui nomme son Recteur.

Quelques dates :

Première posée le 19 octobre 1922, en présence du Maréchal Lyautey (Résident général du Protectorat français au Maroc). La Grande Mosquée de Paris est construite sur l’emplacement de l’ancien hôpital de La Pitié. Les maîtres-d’œuvre sont : Robert Fournez, Maurice Mantout et Charles Heubès.

Inauguration du lieu de culte, le 16 juillet 1926, en présence du Président de la République, Gaston Doumergue, du Sultan du Maroc ; Moulay Youssef. C’est l’occasion de célébrer l’amitié franco-musulmane. La France laïque affirme avec cette construction qu’elle se veut la protectrice de toutes les Croyances.

En 1929, le minbar est offert par Fouad 1er, roi d’Egypte.

A l’intérieur de l’édifice on trouve une plaque commémorative à la mémoire des soldats maghrébins Morts pour la France durant la Seconde Guerre mondiale. Sur la participation active (et, supposée) de la Grande Mosquée de Paris et de son Recteur, Si Kaddour Benghabrit – notre article précédent:

https://blog.madeinailleurs.fr/2022/08/30/quand-des-musulmans-sauvent-des-juifs/

En 2015, l’Algérie annonce officiellement vouloir entamer  l’ouverture des procédures en vue d’acquérir la propriété de la grande mosquée.

Chems-Eddine Hafiz en est le Recteur depuis janvier 2020.

La Grande mosquée de Paris signe la Charte des principes pour l’islam de France, le 18 janvier 2021.

Le 17 mars 2021, la Fédération de la Grande mosquée de Paris et trois autres fédérations fondatrices quittent le bureau exécutif du CFM.

Juillet 2022, lancement du Prix littéraire, qui récompense le meilleur roman et le meilleur essai de l’année sur la civilisation de l’islam.

La Grande mosquée de Paris a organisé les commémorations du centenaire de la pose de sa première pierre le 19 octobre 2022. Le Président Emmanuel Macron participe aux célébrations. A l’issue, il a remis au Recteur les insignes d’officier dans l’Ordre national de la Légion d’Honneur.

La Grande mosquée et son Recteur sont résolument inscrits dans le dialogue inter religieux, le dialogue pour la paix, et la concorde nationale.

« Made in Ailleurs.fr » organise de visites de la Grande Mosquée de Paris et vous proposé également une visite des lieux significatifs de la présence arabe à Paris (chrétiens et musulmans) –

https://www.madeinailleurs.fr/visites/paris-region-parisienne/

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